Très connu pour ses nombreux solos dans des chansons légendaires (l’été indien, le téléphone pleure, Rio Grande etc etc), Pierre Dutour est décédé à l’âge de 92 ans. Un monument de la trompette qui laisse un héritage énorme derrière lui.
Le trompettiste Pierre Dutour est décédé hier à l’âge de 92 ans. Michel Laplace a publié un hommage que nous vous relayons afin d’en savoir plus sur ce trompettiste hors pair.
“Il serait injuste de réduire Pierre Dutour à la doublure de Borelly (alias Ballon, qui a perdu un procès pour cette supercherie et qui s’assume seul maintenant). PIERRE DUTOUR fut un musicien de studio reconnu qui a prêté son talent à Nino Ferrer, Joe Dassin (“L’été indien”), Claude François (“le téléphone pleure”), Eddy Mitchell (“Rio Grande”, 1993), Patricia Kass (“Mademoiselle chante le blues”), Dalida, Johnny Hallyday, Carlos, Yves Montant, etc etc.
Mais Pierre fut aussi un excellent jazzman avec un beau CV: Guy Lafitte, Alix Combelle (1957, 1959), Jacques Hélian (1958, avec Dizzy Reece), Aimé Barelli (1958-59), Hubert Rostaing, Jacques Denjean (bon disque en 1962 avec Ivan Jullien, Fonsèque, Badini, Chanson, etc), Claude Bolling (1962-67), Claude Guilhot (1969-70), Bill Coleman (avec Léo Clarens), etc.
Notre premier contact fut par téléphone car il avait été scandalisé par des écrits de Jacques Pescheux qui qualifiaient la sonorité d’Aimé Barelli d’agressive, aigre…!! Alors qu’Aimé était respecté dans le métier pour la qualité de sa sonorité et son art à jouer “double piano”! Un point commun entre Pierre Dutour et Aimé Barelli est qu’on entend dans leur style l’influence de Louis Armstrong. L’autre modèle de Pierre Dutour était Clifford Brown. Pierre Dutour malgré ses compétences a toujours eu des doutes. Ce qui fait qu’il a consulté Jean Greffin (1957), Robert Pichaureau (1959), Pierre Thibaud (1975), Robert Astre et, j’en fus témoin, Fred Gérard. Fred l’a beaucoup aidé et a employé les services de Pierre dans ses Five Trumpets (comme remplaçant de Jean Baissat). Pierre est venu aux obsèques de Fred Gérard mais il ne jouait plus et ne s’est pas joint au petit ensemble de trompettes que j’ai recruté pour la cérémonie autour d’anciens élèves de Fred (Emmanuel Martin, Gilles Zabezinski) (Guy Touvron, tp1, René Caron). Pierre Dutour, musicien de studio à partir de 1972, peut être entendu dans beaucoup de musiques de film : “Borsalino”, “Un linceul n’a pas de poche” de Mocky (1975 qui a donné naissance à l’ “affaire JCB”), “Le Bal” d’Ettore Scola(1983), “L’Aile ou la cuisse” (1976, c’est Pierre Thibaud à la piccolo, Dutour pour les passages jazzeux)… mais celle que je préfère est “Liza” beau film de Ferreri (1971). Écoutez la sensibilité de son bugle aux côtés d’Hubert Rostaing (cl) et Stéphane Grappelli (vln), rien moins!

Pierre a fait quelques disques sous son nom qui n’ont pas eu le succès de ceux de Barelli, Jouvin, Fred Gérard, Pierre Sellin, Fernand Verstraete (Trumpet Boy) et…Borelly (et pourtant le style de Pierre Dutour est facilement reconnaissable dans les premières éditions du studio Delphine, P. de Senneville-O. Toussaint). Paradoxe! Dans la vidéo avec Nino Ferrer, Pierre Dutour utilise une embouchure Parduba (double cuvette)”
Extrait de sa Biographie dans Le Monde de la Trompette et des Cuivres (Pdf, M. Laplace